CRITIQUE – Alita Battle Angel – La conquérante vengeresse
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Une quête épique d’espoir et de responsabilisation amène Alita (Rosa Salazar) sur Terre après plusieurs siècles de sommeil. Quand Alita ouvre les yeux, elle vient au monde une seconde fois. Elle n’a plus aucun souvenir de son passé lointain ou ce qui l’a amenée ici. Ido (Christoph Waltz) un cybernéticien de génie parvient à la réparer et lui redonner vie. Celui-ci l’ayant trouvée dans la décharge du Kuzutestsu. Alita essaie de se rappeler ses origines et choisi le chemin de la vérité. Même si son introspection l’amène à penser que son passif est sombre. Ido, quant à lui, essaie de la protéger de son activité nocturne mystérieuse. Alita rencontre alors Hugo (Keean Johnson), avec qui elle commence à tisser un lien amoureux. Dans les rues d’Iron City elle traque ses souvenirs, mais se rend finalement compte qu’une puissance inconnue l’habite. Il s’agit là d’une étrange capacité à se battre. Elle commence alors à comprendre que son destin est bien plus important que son passé. Elle rejoint donc Ido dans ses activités nocturnes.
Durant une guerre interplanétaire son rôle était de premier ordre. Elle sabota plusieurs vaisseaux de la Terre mais fut ensuite retrouvée par une guerrière appelée Kaelhula Sangwiss. Jugée, Alita fut condamnée à mort en étant désintégrée dans l’atmosphère. Cependant son cerveau ayant survécu s’écrasa dans Kuzutestu. Deux cents ans après, Ido retrouve le corps du cyborg dans la déchetterie. La tête étant intacte, il décide de lui redonner vie. Il la prénomme Gally (Alita) en hommage à son chat disparu quelques semaines auparavant.
Yukito Kishiro s’est directement inspiré du cinéma de SF américain. A travers la naissance d’Alita (Gally) il fait référence à la « Fiancée de Frankenstein ». De plus son apparence biomécanique est tirée de la créature « Alien » de Hans Ruedi. Le panorama post apocalyptique de Kuzutestsu, mélangeant habilement humains et cyborgs, évoque la cité futuriste de Los Angeles de « Blade Runner » de Ridley Scott. Alors que Zalem est une touche directe au paradis robotique de « Metropolis » (Fritz Lang, 1927). On retrouve également des origines de « Orange mécanique » de Stanley Kubrick. Le motorball dans lequel plusieurs cyborgs s’affrontent n’est pas sans rappeler le film « Rollerball » de Norman Jewison.
Pour créer Gunnm, Yukito Kishiro puise donc dans les genres de la science fiction. Il met aussi en avant la nanotechnologie par laquelle l’homme s’hybride avec la machine en quête d’immortalité. Le dessinateur impose alors une image noire du futur. Dénonçant ainsi les dérives d’une science qui impacterait sur le plan social de chaque individu.
Voyons un peu plus loin, à l’ère de la cybernétique, le corps n’est qu’une partie qui peut être changée constamment. Un contenant interchangeable alors que le contenu, à savoir le cerveau, n’offre aucun moyen de remplacement. Celui-ci se révèle unique. Antonio Dominguez Leiva dans ses « Quelques représentations de la nanotechnologie dans le manga » pense que cette localisation du « soi intérieur », conçu comme « une identité sociale et comme principe spirituel », constitue une manifestation de la « symbolique cartésienne ». Le cerveau d’Alita reste par conséquent siège de son identité, malgré son amnésie permanente.
Lors des premières bandes annonces, on a en effet pu constater le côté exorbitant de ses yeux. Toutefois cela reste une caractéristique visuelle et iconique du manga. De plus, les fans de la communauté seront ravis d’apprendre que le film respecte parfaitement le schéma de Yukito Kishiro ! Plus précisément l’histoire du film s’abreuve des premiers tomes (1 et 2). Mais également des quelques pièces maîtresses du troisième tome. Le scénario est signé Laeta Kalogridis, remarqué par sa qualité évidente. Une personnalité à suivre pour ses réalisations dans le domaine du cyberpunk. Dont le projet de « Altered Carbon » de l’année précédente.
On dénotera hélas le manque d’ambition de l’opus. Pour connaître l’œuvre par cœur nous avons été -non- surpris de constater qu’il y a une absence de rebondissement dans l’histoire du film. Malgré tout, quelques scènes attractives viennent combler les trous. Parmi celles-ci, les passages du Motorball. On ressent une certaine empathie vis à vis d’Alita, sans oublier son essence mécanique. Une performance de Rosa Salazar, qui joue avec brio. Tout comme Kishiro l’a spécifié dans son entrevue, la modélisation des cyborgs est relativement bien soignée. Il n’est pas évident d’explique que chaque pièce semble se mouvoir de manière individuelle comme ci elles étaient l’effort d’une multitude de designers.
« Gunnm regroupe donc tous les poncifs des œuvres où la machine, pouvant être conçue comme une arme mortelle, renferme la capacité spécifique aux êtres vivants de désirer et son principal souhait n’est autre que de posséder une humanité ».
Toutefois le manga a cet aspect huileux d’un moteur à essence presque crade que ne possède pas le film. Pour un rendu idéal nous vous conseillons de voir le titre en 3D plutôt qu’en 2D. En plus d’une histoire finement ficelée, on découvre des combats ralentis issus de la tendance Matrix. Mais le celui-ci gâche le côté improvisé et puissant la Gally du manga. En outre de sa vision 3D trop lissée par rapport aux ciselages marqués du manga, on dénote un film vraisemblablement trop conventionnel avec des dialogues limite niais. La déception peut être d’une Alita perdue et qui se retrouve dans le combat sans pour autant s’en réjouir vraiment. Dans le manga, Gally renaît en humaine grâce à son désir d’amour et d’humanité. Elle développe ensuite une âme, un peu à la façon du conte de Pinocchio. Elle représente aussi l’élément déclencheur de la rébellion entre Zalem et la ville décharge de Kuzutestsu.
Découvrant sa puissance à la bataille, celle ci décide de devenir Hunter-Warrior épaulant les activités nocturnes d’Ido. Pour se défendre face aux oppresseurs cyborg, elle utilise une technique de combat imparable. Le Panzer Kunst provient de la même planète qu’elle, à savoir Mars. Gally est avant tout à la recherche de sa propre humanité. La science lui redonne vie en lui apportant un corps mécanique, alors peut-elle encore aimer? Vivre comme les humains faits de chair et de sang ? Les cyborgs sont-ils encore réellement humains ou ne sont-ils qu’une arme vivante ? Il semble que l’amnésie d’Alita s’évapore pendant le combat, comme notre cyborg favori semble être née pour tuer.
On peut également parler ici de karma. Ayant massacré des innocents par le lointain passé, son âme inconsciente tend à se rappeler et à se racheter. L’environnement dans lequel elle évolue maintenant est le fer de lance d’une réflexion poussée. Celle des conditions de vie humaines et sociales sur Iron City. Alita peut être pleine de fureur ou pleine de compassion. Cette danse entre humanité et inhumanité modère et régit le tempérament d’Alita. On peut dire que son cœur balance.
Jean Marie Boissou, auteur de l’ouvrage « Histoire et univers de la bande de la bande dessinée japonaise » analyse l’œuvre. En effet, elle décèle dans Gunnm un effet miroir de la réalité nippone. Voulu ou non, elle retrouve l’histoire du Japon et de son ouverture sur le monde durant l’ère Meiji. Une histoire qui va jusqu’à la fin du XXe siècle. Dans cette idée, la ville futuriste et modernisée de Zalem est explicite. Avec ses habitants blancs aux noms anglo-saxons, on retrouve l’image du monde développé européen. Celui-ci exerce une domination totale sur le reste de la Terre. Comprenant donc le peuple « métissé » et les cyborgs de la décharge du Kutsutetsu (Iron City). Parmi ce peuple de métisses, diverses facettes de la population japonaise sont repris à travers les personnages principaux.
Au cœur du récit, Alita est le reflet du parcours nippon à cette époque. Par conséquent, dans sa quête d’identité, elle suit divers périodes de développement. Elle est en premier lieu « agresseur de ses voisins » (chasseuse de prime). Puis « vainqueur de la compétition économique » (championne du motorball), pour finir « allié des États-Unis » (mercenaire de Zalem). Finalement elle découvre son identité : Alita, guerrière vaincue.
Author's rating
Passionnée par l’horreur depuis l’enfance, j’ai vu mon premier film très - trop ?- jeune. Que ce soit au premier ou second degré, mon amour pour "le côté obscur" s’est étendu progressivement aux jeux vidéos (Resident Evil, Silent Hill...), aux atmosphères post-apocalyptiques ou glauques (l'incontournable HP Lovecraft) ou encore aux jeux de plateau (Les demeures de l'épouvante...). Je satisfais mes envies créatrices via la photographie Urbex, le dessin, et - accessoirement - par une dévotion totale à l'écriture d'articles sur votre site de Dark Culture préféré ! Artiste Ouverte sur le monde